Le premier parcours Vision pastorale avec 12 paroisses de l'île Maurice vient de s'achever. Nous vous partageons les témoignages de participants à ce parcours.
Témoignage du père Piat et de Sonia de la paroisse Sainte Ursule à Flacq
Interview du père Veder de la paroisse du Sacré-Cœur à Beau-Bassin
Quelle était la situation de votre paroisse avant ce parcours ?
Je suis arrivé le 1er février 2020 dans une paroisse blessée suite à d’importants conflits internes. Le 20 mars nous entrions en confinement : tout ce que j'avais prévu comme plans pour relancer la paroisse est tombé à l'eau. Ça nous a toutefois permis de vivre un temps très fort de solidarité. Avec le confinement, les magasins ont fermé et toute une partie de la population n’avait plus rien à manger. J’ai donc imaginé avec une équipe de volontaires et Caritas une campagne de dons, puis négocié avec les supermarchés pour avoir de la nourriture que nous sommes allés distribuer.
Le parcours Vision pastorale commençait sur le diocèse au moment où l'évêque m'a nommé. Au départ je ne voulais pas faire ce parcours car je ne connaissais pas assez les personnes et celles que je pouvais appeler à rejoindre l'équipe. Je souhaitais d'abord me concentrer sur la paroisse mais, à la demande de l'évêque, j'ai accepté de suivre le parcours et je ne le regrette pas un seul instant.
Avec cette équipe Vision pastorale de 20 personnes et tout le coaching dont nous avons bénéficié, on a pu faire la relecture de la paroisse et de son histoire. Ça a été pour moi très instructif, on est parvenu à mettre sur pied une vision commune avec les laïcs.
Comment fait-on pour concevoir une équipe vision en arrivant sur une paroisse où l'on ne connaît pas les personnes ?
Quand je suis arrivé il y avait déjà une EAP (équipe d'animation pastorale) en place. À la première réunion que j'ai eue avec eux, je les ai écoutés et tout le monde m'a fait comprendre qu'ils souhaitaient partir car ils étaient là depuis de nombreuses années. Je les ai suppliés de rester 6 mois de plus pour m'introduire dans la pastorale de la paroisse et m’aider à connaître les gens pour concevoir mon équipe Vision pastorale. On a renouvelé l'EAP cette année avec plusieurs personnes issues du parcours Vision pastorale.
Qu'est-ce que ce processus de vision vous a apporté au niveau de la paroisse ?
Ce qui m'a beaucoup aidé et touché c'est d'écouter les laïcs pour comprendre leurs histoires, y compris leurs blessures, pour ensuite travailler ensemble et vivre cette co-responsabilité. Ce processus de vision nous a permis d'arriver ensemble à dégager une vision. Ce n'est pas ma vision, c'est la vision d'un groupe de laïcs représentatif de la paroisse avec lequel on parle un même langage. Aujourd'hui si je parle des 5 essentiels par exemple, on se comprend. Lorsqu'on est autour de la table et qu'on réfléchit avec l'EAP, on a ce même langage. Ce travail m'a obligé à accepter d'aller plus lentement car je suis quelqu'un qui va très vite et déborde d'imagination. Ça m'a permis d'écouter, de comprendre ce que disent les laïcs, de mettre parfois de côté ce que moi je pensais pouvoir être bon pour la paroisse. Et dans ce processus de vision il y a également le fait de penser à ceux qui sont loin, toujours dans cette perspective missionnaire d'œuvrer à la conversion pastorale.
“Ce processus nous a permis d'arriver ensemble à dégager une vision. Ce n'est pas ma vision mais celle de notre paroisse.”
En arrivant sur la paroisse, j'ai eu la chance d'avoir cette équipe qui m'a fait dire : "attends, regarde, écoute, comprends, accompagne puis ensuite on verra ce qu'il va s'en dégager." Je sens que maintenant dans la paroisse on parle beaucoup de fraternité, d'unité, de convivialité, les gens veulent être ensemble. Il y a un désir de faire route ensemble.
Qu'est-ce que vous aimeriez dire à vos confrères curés qui pourraient encore hésiter à se lancer dans ce parcours ?
Moi-même j'ai hésité. Ça fait peur parce que quelque part on se dit : “à quoi ça va servir ?”. Mais ne serait-ce que de travailler et cheminer ensemble avec une équipe de laïcs, de ne pas porter ça seul, c’est déjà beaucoup. Quand je suis arrivé sur la paroisse cela m'a semblé une montagne, j'appréhendais. Puis j'ai nommé 3 laïcs responsables du parcours Vision pastorale, avec lesquels j'ai été en dialogue constant. Ça m'a libéré de beaucoup de choses. J'ai une des plus grosses paroisses de l'île. Quand on sait qu'on a des personnes sur qui on peut compter, à qui on peut faire confiance, il ne faut pas hésiter.
“Moi-même j'ai hésité. Ça fait peur parce que quelque part on se dit : “à quoi ça va servir ?”. Mais ne serait-ce que de travailler et cheminer ensemble avec une équipe de laïcs, de ne pas porter ça seul, c’est déjà beaucoup.”
Les trios de prêtres permettent de vivre complètement la fraternité sacerdotale. Le fait de travailler avec deux autres prêtres et un coach, de pouvoir se dire en vérité comment ça va dans sa paroisse et de s'apprécier mutuellement, est capital. Il n'y a aucun lieu où nous pouvons venir exposer ce que nous sommes en train de vivre dans nos paroisses et ça c'est très intéressant. La présence du coach nous aide à avancer et à aller plus loin.
Quelle a été l'étape la plus importante de ce parcours pour vous et votre équipe ?
Quand nous avons parlé des dynamiques de conversion, ça a été comme un déclic. Puis il y a eu un moment où j'ai senti comme un relâchement dans l'équipe. J'ai donc écrit à chaque membre pour leur demander s'ils voulaient continuer et quasiment tous m'ont confirmé leur motivation. On a eu également un déjeuner avec les conjoints des membres de l'équipe pour qu'ils puissent découvrir notre projet.
Lorsque nous avons présenté les chantiers lors de notre dernière soirée, il y a eu un grand enthousiasme. Je craignais qu'il y ait beaucoup à faire mais eux étaient ravis. J'ai senti un grand dynamisme. Ça a été un grand moment.
Qu'est-ce qui vous a le plus touché dans ce parcours ?
Quand on a fait le questionnaire de Rick Warren où il a fallu aller aux périphéries et entendre les personnes nous dire : "voilà pourquoi je ne viens pas à l'Église, voilà ce que j'attends de l'Église." Ça m'a beaucoup touché de faire cette étape “d'aller vers”, de rencontrer d'autres personnes.
“Le questionnaire de Rick Warren nous a fait prendre conscience que notre paroisse n'était pas assez accueillante. Ça a été un vrai choc pour nous mais cela nous a permis de travailler à une meilleure évangélisation de notre paroisse.” Une laïque de la paroisse Notre-Dame